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Un récit court et documenté pour éclairer une mutation technologique, scientifique, industrielle, commerciale, sociale ou artistique venant de Chine.

La Chine dans la course aux marques

L’Amérique reste l’empire des marques. La Chine compte ses champions mais ses prétendants, à l'exception de TiKtoK et Xiaomi, peinent à être désirables dans le reste du monde. La France est de plus en plus confinée dans son sanctuaire des icônes du luxe. On pourrait résumer ainsi les rapports de force entre les grandes puissances mondiales rapportés à la puissance de leurs marques respectives. Chaque marque a son prix mais c’est le désir qu’elle suscite qui est sa valeur ultime : à cette aune l’Amérique surclasse la Chine. Moutai vaut plus que Coca-Cola, Haier plus que Mercedes et TiKtoK plus que Snapchat Mais les marques chinoises, à quelques exceptions près, sont désirables parce qu’elles sont puissantes là où les marques européennes et américaines sont puissantes parce qu’elles sont désirables. 14 marques chinoises font désormais partie du classement alors qu’elles étaient 18 en 2021 selon le verdict de Most Valuable Global Brands, l'étude annuelle de Kantar BrandZ. Dans l'ordre décroissant les stars de 2021 étaient Tencent ( 5 ), Alibaba ( 7 ), Moutai ( 11, cinq places devant Coca-Cola ), Meituan, JD, TiKtoK ( 45, une place devant DeutscheTelekom ), Ping An, Huawei ( 50 ), ICBC, Haier ( 65, deux places devant Mercedes ), China Mobile, Xiaomi ( 70, une place devant BMW ), Baidu, Pinduoduo, Didi, AIA Group, la banque CCB ( 94, une place devant Pampers ) et Ke.com la plateforme de l’immobilier d’occasion ( 96, trois places devant Spotify ). Cette année Pinduoduo, Didi, Baidu, CCB et Ke.com sont sorties du classement. Six critères principaux font, selon Kantar BrandZ, la puissance d’une marque : sa performance boursière, l’expérience qu’elle propose ( soit la garantie d’une expérience singulière et supérieure à travers tous ses points de contact et de rencontre avec ses acheteurs ), sa fonctionnalité ( soit la performance de ses produits et de ses services qui doivent rester constamment à la hauteur des exigences changeantes des consommateurs ), sa praticité ( soit son impact sur la vie quotidienne ), sa visibilité ( soit le volume et la pertinence de ses investissements publicitaires ) et sa réputation environnementale. Dans le classement mondial le leader chinois est Tencent, 5 ème avec une valeur de 214 milliards $ et Alibaba est 9 ème avec 170 milliards $. Doreen Wang, l’une des têtes de Kantar BrandZ salue « l’avance et l’innovation de la Chine en matière de paiements numériques » soulignant que « la numérisation des marques est plus rapide en Chine qu’en Europe et aux USA ». Le capitalisme d’aujourd’hui est numérique, on le savait déjà et les marques chinoises en sont l’un des moteurs les plus performants.



A part cela quoi de neuf ?

La marque est une valeur qui crée de la valeur ( ce n’est pas neuf mais cela n’a jamais été aussi vrai ) : la valeur cumulée des marques a progressé de 23 % cette année et leur valeur cumulée atteint 8700 milliards $ soit le PIB additionné de la France, de l’Allemagne et de l’Italie.

D’un point de vue comptable les marques chinoises sont plus puissantes que les marques européennes ( c’est neuf ) : ces dernières ne représentaient en 2021 plus que 8 % de la valeur totale des 100 marques les plus puissantes du monde alors qu’elles comptaient pour 20 % en 2011 et les marques chinoises sont passées pendant la même décennie de 11 % à 14 % de la valeur globale.

C’est la puissance de l’algorithme qui crée le plus de valeur de marque : en 2021 sept marques dans le top 10 étaient des marques tech et ce petit club représentait une valeur de 3300 milliards $, la seule valeur d’Amazon ( 684 milliards $ ) équivalant au PIB de la Pologne.

La France est devenue le sanctuaire du luxe ( ce n’est pas neuf mais c’est inquiétant ) : dans l'édition 2022 Vuitton est 10 ème du top 100, gagnant 11 places ( 124 milliards $, + 64 % ), Hermès 27 ème ( 80 milliards, + 73 % ) Chanel 45 ème ( 63 milliards, + 13 % ) et L’Oréal Paris 50 ème. Nous avons raison d’en être fiers mais nous aurions tort de ne pas nous inquiéter. Nos trois icônes sont des marques d’un autre siècle, créées en 1837, 1854 et 1910 et dont l’industrie du luxe a su brillamment faire des rentes plus durables que toutes les rentes pétrolières du monde. Elles sont vitales pour l’emploi, pour notre PIB, pour notre prestige et notre attractivité mais quelle promesse d’avenir portent-elles ? En quoi peuvent-elles transformer positivement notre monde sous haute pression ?

L'Amérique reste la marque la plus puissante du monde.

Elle le doit évidemment au leadership des GAFAM mais aussi beaucoup à la diversité de ses marques. Dans le top 100 cohabitent cinq familles différentes : les marques mythiques qui ont construit l’imaginaire du rêve américain ( Mc Donald’s, Nike, Coca-Cola, Marlboro, Disney, Netflix, Budweiser, Starbucks, Walmart ), les marques qui ont bâti l’infrastructure technologique de sa suprématie industrielle ( Cisco, Oracle, IBM, Dell, ATT, Verizon ), les marques qui ont partagé sa puissance financière et facilité la circulation de l'argent ( Visa, Mastercard, Wells Fargo, JPMorgan, Chase, Bank of America, PayPal ) et les marques pionnières de l'industrie du futur ( Nividia, Qualcomm, AMD, Intel, Tesla ) créatrices des richesses d’aujourd’hui.

Le cowboy Marlboro roule désormais en Tesla et soigne sa solitude avec Instagram : c’est ainsi que le modèle américain se réinvente sans cesse. L’avenir dure longtemps et c’est à sa capacité à le faire durer que l’on devrait évaluer la vraie puissance d’une marque. Aujourd’hui ce sont encore les marques américaines qui le font le mieux. Ce n’est pas un hasard si elles sont 38 dans le top 50 des marques les plus puissantes du monde et si la première s’appelle Apple.

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